INTENTIONS 2011
« L’expression est le cadeau que le monde comme multiplicité offre au monde comme unité. »
(AN Whitehead, Modes de pensées)
La nécessité, partagée par les artistes et par tous ceux qui composent la société, de trouver des modes et des espaces d’expression est un des moteurs les plus puissants de la création et de l’invention. D’un autre monde part d’une intuition, celle que nous vivons un moment de transformation du paysage contemporain au centre duquel la question de l’expression est centrale. Après un long moment dominé par l’incessante relecture - remises en cause ou prolongements - des outils forgés par l’art moderne, un épuisement des enjeux de la modernité a conduit les artistes à se tourner vers d’autres sources. Dans un monde saturé d’images et d’histoire, c’est à des énergies plus abstraites et plus élémentaires que les artistes ont fait appel pour libérer de nouvelles possibilités d’expression. Gestes, traces, totems, cérémonies, invocations sont parmi les outils qu’une génération d’artistes utilise pour proposer des déplacements qui s’apparentent plus à de l’alternative qu’à de la critique. Il ne s’agit ni d’un retour à des valeurs stables, ni d’une quête d’authenticité, mais d’une nouvelle négociation entre l’homme et son milieu. Aux frontières étanches définies par la modernité se substitue une porosité qui permet de donner forme aux singularités en les ouvrant sur l’extérieur, à la recherche de mondes communs.
L’ensemble des expositions se composera comme un paysage, cohérent et pourtant multiple. Le Printemps de Septembre est disséminé à travers la ville de Toulouse et ses environs, mais chaque partie de cette édition sera élaborée en relation aux autres, pour raconter une histoire, créer un climat plutôt qu’un discours. Il y aura peu d’images, et peu de mots, mais beaucoup de formes et de matières, d’émotions et de sensations. En effet, les artistes choisis pour cette édition, peintres, sculpteurs, perfomeurs, vidéastes, ont pour point commun de ne pas représenter le monde tel qu’il est, mais de proposer des univers, abstraits, imaginaires, ancrés dans l’ailleurs et dans l’autrement . Le festival cherchera cette année à renforcer ses relations au territoire dans lequel il s’inscrit, en ouvrant les pratiques artistiques à des collaborations avec d’autres espaces sociaux, par exemple Maroussia Rebecq avec le festival Occitània, et Oscar Tuazon avec le département Europhilosophie de l’Université de Toulouse. Sophie von Hellermann, Fredrik Vaerslev et Ei Arakawa travailleront aussi à partir de situations spécifiques à la ville. Aux Abattoirs, le parti pris sera celui de la peinture (avec entre autres Josh Smith, Joe Bradley, Alex Hubbard, Christopher Wool, Sergej Jensen, Matias Faldbakken, Paul Thek, ...). Au Château d’Eau, seront présentées des tapisseries de Dom Robert – symphonies animistes réalisées depuis l’Abbaye d’En Calcat. Une école expérimentale, », dessinée par Oscar Tuazon, et où artistes et théoriciens viendront donner des «leçons» ouvrira ses portes dans la salle des Pèlerins de l’Hôtel Dieu. Afin de permettre un accès approfondi à l’univers de chaque artiste, les expositions ont été pensées comme autant de monographies, concentrées, ou fragmentées à travers le festival.
Anne Pontégnie, Directrice Artistique 2011
