Le projet de Marseille-Provence 2013, Capitale européenne de la culture, est euroméditerranéen. C’est pourquoi des artistes ont été sollicités pour présenter leurs visions des liens de l’Europe et de la Méditerranée.
Josef Koudelka est né en Tchécoslovaquie. Cet Européen d’un pays sans mer s’est engagé de 1991 à 2012 dans un long et patient périple qui l’a conduit dans les dix-neuf pays du pourtour méditerranéen et plus de deux cents sites archéologiques de l’histoire grecque et romaine.
Cette exploration est sans précédent. Personne, avant lui, n’avait tenté, avec une telle opiniâtreté, sans aide matérielle, une représentation aussi complète des vestiges d’une grande histoire par
les moyens de l’art photographique.
Au XIXe siècle, les peintres romantiques aimaient les ruines. Ils en faisaient des tableaux à la gloire de la mélancolie.
Josef Koudelka fait aussi des tableaux de ruines. Mais il n’est pas romantique et ne cultive pas la mélancolie comme ferment de son art. Les traces ne sont pas pour lui des restes émouvants de ce qui meurt. Elles sont les signes d’une actualité dont l’art doit restituer le sens dans notre présent : ici, sur les bords de la mer commune, c’est l’actualité de la naissance de l’Europe et de ses valeurs fondatrices.
Cette œuvre s’inscrit dans une lignée. Koudelka poursuit le chemin qu’il a parcouru dans Exils,
La mission photographique de la Datar, La mission Transmanche, Chaos. C’est le chemin des paysages où risquent de s’effacer la grandeur et la peine de l’action des hommes. Depuis les ruines industrielles du nord de la France jusqu’aux colonnes des forums et des temples, il ne s’agit pas pour lui de documenter une histoire qui n’en a nul besoin. Il s’agit de se réapproprier, par les moyens de la représentation artistique, les significations d’un monde qui nous échappe
et que nous pourrions perdre, ce monde où l’esprit fait dialoguer la raison et la foi, la liberté et
la loi. Ce monde, dont selon Jacques Berque, « nous portons en nous les décombres amoncelés et l’inlassable espérance ». Transfigurer les décombres en espérances, telle est l’ambition accomplie de Josef Koudelka au travers du voyage exceptionnel dont les étapes sont exposées ici.
Commissariat : Bernard Latarjet